Nubiens d'Egypte : une ethnie en voie de disparition

Assouan en Egypte
Assouan en Egypte

Les habitants du sud de l’Egypte et du nord du Soudan formaient depuis plusieurs milliers d’années jusqu’à encore les années 60 de notre époque contemporaine un peuple nommé les nubiens.

Ils sont en effet une ethnie qui disposait d’une culture, de traditions et de coutumes qui lui étaient propres, d’une langue commune se déclinant en deux dialectes, le "Kanzi" et "Fadja", une transmission des mythes et des histoires principalement par l’oral ainsi qu’une religion, bien que fortement inspirée par le panthéon vénéré par les Egyptiens de l’antiquité, leurs voisins.

A partir des années 60, les Nubiens d’Egypte qui étaient principalement des agriculteurs, ont vu leur environnement profondément modifié dès que la construction du barrage d’Assouan commença. Les eaux du Nil inondaient depuis la nuit des temps la vallée fertile que le fleuve traverse. Ces eaux en provenance de l’Afrique de l’Est, étaient essentielles pour permettre l’exploitation agricole des sols. Toutefois, la force des crues d’année en année était très variable. De ce fait, lorsque les crues étaient trop faibles, les agriculteurs ne produisaient quasiment rien et cela entrainait à coup sûr une famine durant l’année. Lorsque les crues étaient trop fortes certaines années, les cultures étaient perdues et entraînaient également une famine.

En 1954, Le président Nasser lance le projet de la construction d’un grand barrage, pour permettre à tout le pays d’accéder à l’énergie électrique, source de progrès, mais aussi de permettre une régulation des crues par la création d’un grand réservoir. Le barrage d’Assouan a été sans conteste une grande source de progrès pour les agriculteurs et pour le pays dans son ensemble.

Toutefois des territoires habités ont dû être immergés définitivement lors de la construction du barrage entrainant ainsi l’exode forcé des populations locales vers d’autres destinations en Egypte. Et cette population est celle des nubiens d’Egypte. La plupart s’est installée plus profondément dans les terres, loin du Nil, loin de sources d’eau et d’infrastructures modernes. L’exode des Nubiens d’Egypte a entrainé le déclin progressif de leur unité, de leurs traditions et de leurs coutumes.

Aujourd’hui l’écrivain Yahya Mukhtar se présente comme l’un des tout derniers défenseurs et digne Nubien d’Egypte. Le romancier qui a connu l’exode à l’âge de huit ans pour partir s’installer au Caire a passé sa vie et son œuvre littéraire à témoigner et militer pour son peuple. Fier de son héritage, il estime toutefois, assez lucide, que les rares personnes se réclamant de son ethnie ne sont pas légitimes. Lors d’une récente interview il a expliqué : 'La vie en Nubie appartient au passé, qui n'existe plus, et les affirmations de certains Nubiens, qui n’ont pas vécu en Nubie,  sont creuses et nostalgiques sans même s’ancrer dans un vécu des prétendants.'

Ce que M. Mukhtar semble souhaiter le plus, ce n’est pas de voir son peuple renaître, car il sait très bien que cela est impossible. En fait, il souhaite que les Nubiens d’Egypte sortent d’un certain anonymat aux yeux des Egyptiens, que ces derniers sachent que les Nubiens d’Egypte ont été sacrifiés sur l’autel du progrès pour le pays. Il souhaite également que ses témoignages à travers son œuvre puissent servir d’archives historiques à son peuple et ce qui le définit. Il souhaite que les Egyptiens accueillent dans leur histoire les Nubiens d’Egypte comme une ethnie sacrifiée pour le bien de la patrie.

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Mis en ligne : Dimanche 7 Février 2021
 
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