Pourquoi les femmes sud-coréennes militent avec le mouvement no bra?
Les femmes sud-coréennes mettent en ligne des photos d'elles-mêmes sans soutien-gorge sous leurs vêtements. Un mouvement féministe sur les plateformes de médias sociaux est né, qui utilise le hashtag #NoBra – qui signifie "pas de soutien-gorge".
L'idée s'est répandue après que l'actrice et chanteuse sud-coréenne "Sulli" a publié des photos d'elle sans soutien-gorge via son compte Instagram, où des millions d’utilisateurs la suivent. Depuis, la chanteuse est devenue pour beaucoup un symbole du mouvement "no bra" en Corée du Sud, la femme envoie un message clair que porter ou non un soutien-gorge est une "liberté personnelle".
Le mouvement anti-soutien-gorge
Malgré de nombreux messages de soutien, Sulli a été confrontée à des réactions qui ne sont pas toujours positives de la part de femmes et d’hommes, nombreux, qui estiment qu'elle "cherche à attirer l'attention" et l'accusant d'être délibérément provocatrice. Certains soutiennent qu'elle utilise le mouvement féministe pour servir sa propre renommée. Un utilisateur coréen a écrit: "Je comprends que le fait de ne pas porter un soutien-gorge est votre choix, mais vous prenez des photos de vous avec des chemises serrées pour bien montrer vos seins. Vous ne devriez pas faire ça.". Un autre a écrit : "Nous ne vous blâmons pas de ne pas porter de soutien-gorge. Nous disons que vous devriez cacher vos mamelons."
Liberté de choix
Courant 2019, des photos d'une autre chanteuse célèbre connue sous le nom de "Hawasa" ont permi au mouvement #NoBra d'être connu du public. Des photos et des vidéos de son retour à Séoul d'un concert à Hong Kong, vêtue d'une chemise blanche sans soutien-gorge en dessous, ont été largement diffusées. Depuis lors, le mouvement s'est intensifié parmi les femmes "ordinaires" en Corée du Sud.
La star sud-coréenne Lina Bae menacée de mort
En 2018, un mouvement avec le slogan "Débarrassez-vous de votre corset" est apparu dans ce pays. À l'époque, de nombreuses femmes avaient décidé de se couper les cheveux, se débarrasser des produits cosmétiques, puis publiaient leurs nouveaux looks sur les réseaux sociaux, comme une sorte de rébellion. Le slogan "Débarrassez-vous de votre corset" est venu exprimer la rébellion contre les normes de beauté irréalistes en Corée du Sud, à cause desquelles les femmes passent des heures à se maquiller et à appliquer des soins de la peau. Bizarrement, pour avoir soutenu le mouvement "Débarrassez-vous de votre corset", la célèbre Youtubeuse Lina Bae aurait été menacée de mort...
De nombreuses femmes ont déclaré qu'il existait un lien étroit entre ces deux mouvements et que la façon dont ils s'étaient propagés sur les réseaux sociaux était un nouveau type de protestation.
Regards gênants à Séoul et caméras espions
Au cours des dernières années, les manifestations de femmes en Corée du Sud se sont multipliées contre la culture de la suprématie masculine, la violence sexuelle et la prévalence des "caméras espions"; cela consiste pour des hommes à cacher des caméras dans les toilettes et autres lieux publics.
L'année 2018 a été une année de grandes manifestations de femmes dans le pays, où des dizaines de milliers de femmes sont descendues dans les rues de Séoul, pour exiger d’agir contre les clips pornographiques tirés des enregistrements de caméras espions.
Certaines femmes sud-coréennes avec lesquelles la BBC se sont entretenues ont déclaré qu'elles étaient désormais confrontées à un dilemme. Elles aiment l’idée de ne pas porter de soutien-gorge, mais elles n'ont pas assez confiance en elles pour le faire en public. L'une des principales raisons qu'elles citent est la peur des "regards pervers", ou pour reprendre l’expression utilisée par les femmes de Séoul, "le regard du viol", un terme en Corée du Sud qui fait référence au regard particulièrement gênant qui fait que les femmes se sentent violées.
Jeon Seung-eun, 28 ans, était membre de l'équipe de production du documentaire de 2014 "No Brablem", qui raconte les expériences des femmes lorsqu'elles se débarrassent de leur soutien-gorge. Song Eun dit qu'elle s’est lancée dans le projet avec des amies lorsqu'elle étudiait à l'université, où elle a commencé à se demander: "Pourquoi pensons-nous qu'il est normal de porter un soutien-gorge?"
Préférence
Et bien qu'elle pense qu'il est bon que plus de femmes discutent publiquement de la question, elle constate également que la plupart des femmes "ont toujours honte" de montrer leurs mamelons à travers leurs chemises. "Elles savent que porter un soutien-gorge est toujours considéré comme la norme en Corée du Sud, c'est pourquoi elles ont choisi de continuer de porter des soutien-gorges", dit-elle.
Soutien-gorge
Park Ae Sol, 24 ans, est un mannequin sud-coréen impliqué dans le mouvement body-positive. L'année dernière, elle a décidé de se filmer au quotidien pendant trois jours dans la capitale, Séoul, sans soutien-gorge. La vidéo a été largement partagée, avec 26 000 vues. Elle dit que certains de ses abonnées choisissent maintenant de porter des soutien-gorges sans armatures au lieu de ceux avec armatures, en guise de "compromis". "Maintenant, je porte des brassières presque tous les jours en été et je renonce complètement à mon soutien-gorge en hiver", dit-elle.
Et ce mouvement ne se limite pas à la capitale, Séoul. Da Kyung, 28 ans, originaire de la province du Jeollanam-do, se dit émue par les photos de la chanteuse et actrice Sulli. Elle porte désormais un soutien-gorge au travail parce que cela gênerait probablement son manager, mais pas lorsqu'elle sort avec son petit-ami. "Mon petit ami me dit que si je ne suis pas à l'aise avec un soutien-gorge, je ne devrais pas en porter", dit-elle.