Une fillette australopithèque de trois ans serait notre plus vieille cousine ?
En 1974 sur le site de Dikika en Ethiopie, des paléontologues découvrent un squelette d'hominidé féminin, un cousin ancestral de l'être humain, âgé de 3,2 millions d'années, qu'ils baptisent Lucy. Ce fossile est un australopithecus afarensis (de la région de l'Afar). On pensait à cette époque que c'était le premier bipède parent de l'espèce humaine, mais pas son ancêtre. Mais en 2000, à moins de 5 km de l'endroit où Lucy a été découverte, une équipe d'anthropologues a découvert le fossile presque complet d'un bébé de 3 ans ! Le fossile, âgé de 3,3 millions d'années, a été baptisé Sélam, ce qui signifie "paix" en amharique, une langue sémitique comme l'arabe, parlée en Ethiopie.
Le fossile était recouvert de grès, une roche d'origine volcanique, et il a fallu utiliser des instruments de dentiste pour dégager délicatement les os ! Les fossiles d'hominidés sont très rares et ceux d'enfants encore plus, car leur os sont plus fragiles que ceux d'individus adultes. Le corps de Sélam aurait été enseveli rapidement à cause d'une inondation et c'est probablement cela qui aurait permis une si bonne conservation du squelette.
Il est possible que Sélam ait été à la fois bipède et arboricole, autrement dit, qu'elle eut appartenu à une espèce qui grimpait souvent aux arbres ou qui vivait dans les arbres. En effet, Sélam a des jambes adaptées à la marche bipède et des doigts longs et courbes formés pour grimper.
A propos de l'afar
De nos jours, l'afar est une région aride, mais à l'époque de Sélam, il y a plus de trois millions d'années, c'était une région verdoyante avec des forêts et des vertes prairies. Les plans d'eau étaient nombreux aussi, le site de Dikika était un site marécageux. Les paléontologues ont également retrouvé sur le site de Dikika des restes d'animaux – des dents surtout – d'un hippopotame et de crocodiles. L'existence des prairies est attestée par les restes de suidés, la famille des cochons, d'impalas (une sorte d'antilope), d'éléphants et d'un hipparion, un animal apparenté au cheval. Enfin, on a retrouvé sur le site des restes de rongeurs appartenant au genre golunda ellioti, ainsi que des restes de tortues géantes.
Le site de Dikika permettrait donc de penser qu'avant les grands changements qui ont mené aux ères glaciaires qu'a connues notre Terre, il existait des régions où des hominidés se sont adaptés à leur environnement et ce, avant l'apparition du genre homo erectus (homme qui se tient debout), notre ancêtre direct. Moins de deux millions après l'ère durant laquelle a vécu Sélam, Dikika était plus aride à certaines saisons.
La datation du fossile et l'estimation de l'âge de l'enfant
C'est en analysant ses dents de lait et ses dents définitives dans les mâchoires que les scientifiques ont estimé l'âge de Sélam au moment de sa mort. L'ancienneté du fossile (entre 3,31 et 3,35 millions d'années pour être précis) a été déterminée en datant les couches de cendres volcaniques qui l'entouraient. Photo : crâne de Sélam.
Caractéristiques squelettiques
Sélam est un individu terrestre bipède, d'aspect simien et habitant une bonne partie du temps dans les arbres, peut-être pour se protéger des prédateurs des marécages (crocodiles).
Selon bon nombre de scientifiques, l'évolution des hominidés vers la bipédie s'est faite progressivement. Ils ne sont pas passés brusquement d'une marche à quatre pattes à une marche redressée sur deux jambes, mais auraient procédé par étapes. C'est d'abord au niveau des jambes et du bassin que des changements se sont opérés. Les bras et les épaules qui ne sont pas indispensables au déplacement bipède, se seraient développés plus tard. Les scientifiques s'accordent désormais à dire que l'évolution de l'humain ne s'est pas faite de façon linéaire, mais que plusieurs espèces apparentées se sont adaptées à leur environnement à une époque donnée. Certaines ont disparu, d'autres ont survécu : L'homo sapiens, "l'homme qui sait", est l’espèce qui a survécu, qui a eu des descendants, le genre auquel l'humain moderne appartient.