Au Koweït, le secteur pétrolier cause d'une grave crise politique

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Le Koweït connait une grave crise politique en ce moment. C'est un projet de loi concernant la "Kuwait Petroleum Corporation" (KPC) qui est la cause d'un affrontement entre gouvernement et opposants politiques. Les échanges sont vifs au sein de l'Assemblée nationale qui étudie la réforme des entreprises "Kuwait Petroleum Corporation" et "Renewable Energy Corporation".

Un projet de loi polémique

Le secteur pétrolier représente 70% des exportations du Kuwait et 41% de son produit intérieur brut (PIB), autant dire que c'est un secteur très stratégique et même vital pour le bon fonctionnement du royaume. Forcément, quand le gouvernement et une partie des députés cherchent à modifier le fonctionnement de l'entreprise publique "Kuwait Petroleum Corporation", un poids lourd industriel au chiffre d'affaire annuel astronomique de 251 milliards de dollars, les tensions se cristallisent.

D'un côté, le projet de loi est présenté par ses supporteurs comme une modernisation de l'entreprise KPC qui devrait supprimer son fonctionnement managérial actuel qui consiste en un PDG et son équipe dirigeante issus du monde industriel, en le remplaçant par un conseil de gestion composé des ministres du gouvernement qui gèrent directement l'entreprise pétrolière. Le comité en charge d’examiner la loi vient de se prononcer, le projet de loi serait "noble et sans vices constitutionnels". Le président de l'Assemblée nationale Marzouq Al-Ghanim s'en est félicité, tout comme Moubarak Al-Harees, ministre d'État aux Affaires de l'Assemblée nationale.

Du côté des détracteurs, ils n'en voient pas l’intérêt et craignent une position ouvrant la voie à de nombreux abus, notamment des détournements de fonds. Parmi eux, le ministre du Pétrole ainsi que le ministre de l'Enseignement supérieur, Saoud Al-Harbi, ont fait part de leur désaccord avec ce projet, bien qu'ils fassent partie du gouvernement. Les sceptiques estiment que les politiques n'ont pas à s'immiscer dans la gestion d'une grande entreprise stratégique, ce n'est pas leur rôle ni leur compétence.

D'ailleurs, le projet de loi a été soumis au vote et fut rejeté, les votes nécessaires au sein de l'Assemblée nationale n'ont pas été atteints. Il est prévu que le projet de loi soit représenté, car le gouvernement tient réellement à l'imposer.

Une vision économique dangereuse pour l'avenir de KPC

L'autre volet critiqué par les opposants à cette réforme, porte sur la vision à long terme que souhaite le gouvernement et les supporteurs de ce changement. Le projet de loi pourrait nuire gravement à la santé financière de la Société d’Etat "Kuwait Petroleum Corporation" et ses filiales, car il prévoit de transférer des ressources financières importantes vers les caisses de l'Etat. Pourtant, ces ressources financières, la KPC en a besoin, puisqu'elles sont nécessaires à la continuité et au développement de l'industrie pétrolière dans le pays.

Par ailleurs, la nouvelle loi transformerait la "Petroleum Corporation" en un véritable ministère, donnerait aux ministres des pouvoirs absolus relatifs aux nominations à des postes de décision et de responsabilité. Les observateurs et experts craignent que ce changement n'entraine la suppression de la bonne gouvernance industrielle de l’entreprise et de ses filiales. Il est ainsi prévu de modifier la composition du conseil d'administration en donnant les pouvoirs décisionnels à 6 ministres ou leurs secrétaires de cabinet ministériel, de rétrograder le PDG à un simple un rôle d’exécutant de la stratégie décidée par le conseil d'administration. 

Un dernier point, non des moindres, concernant ce projet de loi a trait à la répartition des bénéfices nets radialement différente des habitudes de l'entreprise. Les dispositions des articles de la loi prévoient de transférer près de 50% de la réserve financière de l'entreprise, soit 1,25 milliard de dinars pour alimenter directement les caisses de l'État, sous forme d'une taxe. Certains spécialistes y voient un risque majeur: celui de rendre la "Petroleum Corporation" vulnérable voire très bientôt déficitaire, le projet de loi prévoyant également de taxer rétroactivement les bénéfices des années précédentes.

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Mis en ligne : Jeudi 11 Novembre 2021
 
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